Villes de cinéma

« Géologue, spéléologue, exploratrice du cinéma, Laure Vasconi opère un travail de dévoilement, révélant les entrailles cachées de la plus grande machine à fantasmes des cent-vingt dernières années.»
Serge Kaganski, Critique de cinéma au magazine, Les Inrocks.

Durant une dizaine d’années, Laure Vasconi a posé son regard sur les studios de cinéma à Hollywood, Cinecittà, Babelsberg, Bollywood ou encore Moscou. Alors que le cinéma rime plutôt avec stars, lumières et tapis rouges, la photographe a choisi de se détacher de ce monde d’illusion et de saisir sur pellicule la face inconnue ou cachée du 7e art. Loin des ambiances de plateaux, l’artiste a en effet scruté le silence entre les productions, la destruction des décors devenus inutiles et la pénombre s’installant dans les grandes halles désertées. Ça et là, quelques indices émergent rappelant au spectateur les lieux qui ont fait l’histoire du cinéma: le nom de Marlène Dietrich dans un studio à Berlin, un décor du Casanova de Fellini à Rome ou une maquette d’Anita Ekberg représentant la célèbre scène de la Fontaine de Trevi dans la Dolce Vita. Par l’absence de détails, la photographe brouille volontairement les pistes et provoque ainsi notre imagination et nos connaissances de cinéphiles. Soudain, on se surprend à recréer la scène, à ramener le hors-champ dans le champ et on rêve d’entendre «moteur! » ou « action! » surgir du cœur de la photographie! Avec son esthétique particulière, ni fictionnelle, ni documentaire, Laure Vasconi réussit avec chacune de ses images, soutenue également par la technique de tirage utilisée*, à nous emmener dans un tour du monde des «usines à rêves» du XXe siècle, nous rappelant, non sans un brin de nostalgie, la fin peut-être proche d’un art à la fois industriel et artisanal.

* Tous les tirages ont été réalisés au procédé charbon à l’Atelier Fresson près de Paris, une technique rare et complexe inventée en 1899 par Théodore-Henri Fresson.