Les larmes, la pluie…
A l’aune de nos illusions perdues, alors que la société du paraître semble nous avoir laissé exsangue et vide, le travail de Nicholas Marolf est semblable aux trilles du merle par un matin gris : un rappel poétique au sein du marasme, un signe que le sensible peut éclore partout… et malgré tout.
Ainsi, bien que ce travail puisse être appréhendé comme un manifeste de ce que nous avons temporairement mais indubitablement perdu - illusions, légèreté et innocence – il n’y a pas ici qu’un constat mélancolique, mais également une forme indicible de renaissance et d’espoir. Les larmes, à l’instar de la pluie qui lave et fertilise, sont certes l’expression de la tristesse, mais aussi symbole de soulagement et d’allégement.
Par ailleurs, la tristesse peut être féconde, comme l’expose parfaitement Adèle Van Reeth lors d’un entretien pour la parution d’Inconsolable, son dernier ouvrage : « On la rejette (la tristesse) parce qu’on pense qu’elle nous conduit vers la mort. J’ai découvert l’inverse. Si l’on suit le chemin de la tristesse, au contraire, cela nous ramène vers la vie, celui qui est triste est toujours vivant. ». Ce propos pourrait également illustrer le travail de Nicholas Marolf, dont l’expression artistique va bien au-delà de l’immédiate séduction, mais nous invite à découvrir une autre face du miroir, loin – pour le citer - du désir aveuglés des yeux.
Si une exposition ne doit pas seulement présenter quelque chose, mais surtout l’exprimer, la présente exposition peut être comprise comme une incitation à dépasser le tain des apparences, pour aller au plus près de ce qui est vivant en nous, et le sublimer en le dépassant.
S’il existe (…) une justification profonde de la poésie, c’est qu’elle vous porte très au-dessus de vous-même.
Philippe Jaccottet /Le Monde, 1983
Vivant et travaillant à Vevey, Nicholas Marolf est diplômé de l’Ecole Cantonale d’Art du Valais. Mieux connu pour ses installations vidéo, pour ses actions d’affichage sauvage, ou pour ses travaux autours du langage, de la traduction et de la transmission, il pratique également le dessin et la gravure.
Il a participé à une cinquantaine d’expositions en Suisse et à l’étranger, notamment au Musée Jenisch ou à l’espace Arlaud. En tant que curateur, il a organisé ou coorganisé de nombreuses expositions à l’Espace Contrecontre entre autres, et participe actuellement en tant que curateur aux 50 ans de Visarte Valais.